17 Novembre 2008 09:30 | Hilton Cyprus - Ballroom B

Serafim



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Serafim

Métropolite orthodoxe, Patriarcat de Roumanie
 biographie

C’est un témoignage personnel que je voudrais vous livrer ici en tant qu’évêque orthodoxe qui a connu le pape Jean Paul II tant par des ren-contres personnelles ou de groupe avec Sa Sainteté que par la lecture de ses encycliques. Je ressens une certaine affinité avec le bienheureux Pape, étant moi-même né dans un Pays anciennement communiste et ayant des respon-sabilités pastorale en Occident, ce qui m’aide à mieux comprendre la per-sonnalité de cet homme de Dieu. Dans ma relation je m’appuie aussi sur quelques articles d’un de grands connaisseurs de la vie de l’Eglise et de la so-ciété de nos jours, le Dr. Nicolae Stroescu, ancien collaborateur et directeur de la section roumaine de la Radio « L’Europe libre » (1988-1994) dont le siège à Munique. M. Stroescu, membre active de la paroisse orthodoxe rou-maine de Munique et conseiller diocésain, a suivi de près, en sa qualité de sociologue et journaliste, la vie et l’activité de Jean Paul II.

Que Jean Paul II fut une personnalité charismatique hors paire, sans doute, la plus grande du XXe siècle est un lieu commun. Aucun autre pape n’a eu un rayonnement plus grand sur l’Eglise, les religions, la culture, la politique et, en général, la société que ce Pape d’Orient.

Apres 450 ans de papauté italienne, l’élection d’un Pape qui n’était ni italien, ni occidental, mais un oriental, un slave d’un pays communiste  a du sur-prendre beaucoup de monde.  L’Eglise de Rome n’avait plus eu un pape d’Orient depuis le VIII e siècle ! Pourtant cette élection s’avéra bientôt être un événement prophétique.

Esprit slave, mystique par nature, marqué dès sa jeunesse par la résistance contre les dictatures : de droite, nazie et de  gauche, communiste, Jean Paul II a su bien allie dans son pontificat le patriotisme polonais avec l’esprit d’ouverture mondiale en devenant  « Pasteur des peuples » (titre d’un article apparu dans le journal « Süddeutsche Zeitung », avril 2005).

J’ai la profonde conviction  que Dieu a fait de ce Pape un prophète de la paix, tout d’abord parce qu’il a contribué comme personne d’autre à la chute du plus inhumain système politique que le monde a connu dans son histoire : le communisme athée. Même si à l’effondrement du communisme ont contri-bué aussi des facteurs économiques et sociologiques, l’apport du Pape est « une confirmation indubitable de l’importance du rôle de la personnalité et de l’esprit dans la création de l’histoire » (Stroescu).  Dès son élection comme évêque de Rome et pape, dans son pays, la Pologne, se réveilla l’esprit d’émancipation de l’idiologie et de l’impérialisme soviétique. Déjà après sa première visite dans sa patrie en 1979 apparaissait le syndicat «  So-lidarité » et la grève de Danzing fraya la voie ascensionnelle de la libération du communisme, tout d’abord en Pologne et ensuite dans toute l’Europe Centrale et de l’est.

La chute du communisme  a redonné à des millions des personnes la dignité humaine fondée sur la liberté et la religion. Politologues, comme l’allemand Gustav Seibt  voient déjà dans l’élection du Pape Jean Paul II in 1978 le signe d’un premier détachement du sécularisme de l’époque des révolutions euro-péennes et le retour de la religion dans la politique mondiale.

Nicolae Stroescu dit lui aussi qu’avec le Pape Jean Paul II « nous sommes témoins et participants du réveil de l’ »homo religiosus « par la politique et au-delà de la politique, même contre la politique quand celle-lui met en péril l’identité humaine profonde et la vocation du sens ».

Le pape – qui a connu en Pologne l’athéisme d’état et en Occident l’athéisme privé né de l’indifférentisme religieux et de l’impératif aveugle hédoniste d’une société  matérialiste – a du réagir avec une sensibilité aiguë face à la crise du sens caractéristique de l’homme moderne, éloigné de la foi. Ainsi s’explique son souci permanent d’aider les hommes à redécouvrir le sens de la vie et la confiance en Dieu.

En même temps, Jean Paul II était  profondément blessé par la désunion des chrétiens et, au niveau des religions, par le fait qu’elles sont souvent causes des conflits ethniques ou interethniques au lieu d’être sources de paix et de bénédiction pour les nations. C’est pourquoi le Pape s’est fait dès le début de son pontificat pèlerin de paix a travers le monde. Dans ses plus de 100 pèle-rinages à l’échelle de la planète, son message de foi, de confiance et de paix touchait les cœurs des millions de gens des cultures les plus différentes.

Le Pape n’a cessé de condamner la guerre (« toute guerre, disait-il est une défaite de l’homme lui-même ») et de se faire médiateur dans les conflits à travers le monde. Il « pria à genoux » les protestants et les catholiques d’Irlande, engagés depuis longue date dans un conflit souvent sanglant, de cesser toute hostilité et de se réconcilier au nom de Dieu.

Lors de sa visité historique à Bucarest, le Pape apposa sa signature, avec le Patriarche Theoctiste, sur un Document condamnant la guerre contre l’Jugoslavie : « Nous exhortons toutes les parties présentes de faire des ges-tes prophétiques pour un nouvel art de vivre dans les Balcans ». Il s’opposa sans réserve au déclanchement de la guerre en Irak. Il a montré sans hésita-tion et sans équivoque aux musulmans que le monde chrétien ne veut et ne conçoit même pas une guerre contre l’islam. Par ses visites à la synagogue de Rome et à Jérusalem le Pape a ouvert une nouvelle page dans l’histoire des relations entre le catholicisme et le judaïsme.

Et parce que la guerre a souvent comme cause la pauvreté, le bienheureux Pape s’est fait constamment  l’avocat des pauvres. Il a condamné sans ré-serve le Nord prospère qui  s’enrichit au détriment du Sud pauvre et exhorta le partage des biens matériels.

L’unité chrétienne a brûle le cœur de cet homme de Dieu pendant tout son pontificat, conscient qu’il était du grave péché de la désunion. Et parce que nous sommes ici dans un pays par excellence orthodoxe, je me plais de dire combien le Pape Jean Paul II aimait l’Orthodoxie et sa spiritualité. En témoi-gnent sa lettre pastorale « La lumière d’Orient » les dialogues avec les ortho-doxes et ses voyages en Roumanie, en Grèce, en Georgie et en Bulgarie, pays à population majoritairement orthodoxes. À Bucarest, il fut reçu avec beau-coup de chaleur par le Patriarche de bienheureuse mémoire Théoctiste et le Saint Synode ainsi que par une foule des fidèles en liesse. Le Patriarche dé-clara que la rencontre avec le Pape était « l’avant goût de l’Eglise unie et in-divise » et le Pape qu’il a vécu « la symphonie de deux Eglises implorant la communion plénière ».

Cette communion plénière de tous les chrétiens est la prière - testament que le Seigneur nous a légué avant sa Passion : « Que tous soient un ! » (Jn. 17, 21).

Il n’y a rien de plus beau et de plus nécessaire que de vivre l’unité de tous et de tout dans nos coeurs purifiés par la prière et l’ascèse. Et de rependre cette paix mystique de l’unité autour de nous à l’exemples des saints.  

Je remercie la Communauté de S. Egidio de m’avoir donner la possibilité de parler à cette table ronde sur une personnalité aussi grande que Jean Paul II de bienheureuse mémoire.

Merci aussi à vous pour votre patience.